TracteursUne tran­si­tion durable vers l’électrification

Plusieurs concepts de moto­ri­sa­tion alter­na­tive visent à réduire les émis­sions de carbone. Tous présentent des avan­tages et des incon­vé­nients. Ici, les trac­teurs poly­car­bu­rants repré­sen­te­raient une solu­tion inter­mé­diaire à faible impact CO2, en atten­dant l’arrivée de l’électrification sur le terrain.

Si les engins agri­coles ne contri­buent que dans une moindre mesure aux émis­sions de dioxyde de carbone en agri­cul­ture (6 millions de tonnes sur un total de 66 millions), il reste néces­saire de leur faire aban­donner le gazole le plus rapi­de­ment possible pour parti­ciper à la lutte contre le réchauf­fe­ment.

Ce carbu­rant fossile a incon­tes­ta­ble­ment la plus grande densité éner­gé­tique qu’il soit possible d’embarquer sur un trac­teur. Mais malgré les progrès tech­no­lo­giques en matière de moteurs, il continue de générer plus d’émissions de CO2 que les autres types de moto­ri­sa­tion. L’hydrogène, le méthane, l’huile de colza ou les moto­ri­sa­tions entiè­re­ment élec­triques permettent de réduire signi­fi­ca­ti­ve­ment ces émis­sions.

Ce bilan positif est néan­moins contre­ba­lancé par une densité éner­gé­tique parfois beau­coup plus faible. En d’autres termes : soit le réser­voir ou la batterie doivent être beau­coup plus grands, soit l’autonomie d’un trac­teur de grande puis­sance est si faible qu’il perd son utilité comme machine de travail.

Possi­bi­lités et limites des moto­ri­sa­tions alter­na­tives pour trac­teurs

Une compa­raison de diffé­rents concepts de moto­ri­sa­tion pour trac­teurs révèle que le gazole a la plus impor­tante densité éner­gé­tique, mais aussi émet les plus grandes quan­tités de CO2. Les carbu­rants alter­na­tifs comme le méthane, l’hydrogène ou l’électricité peuvent, certes, réduire de manière signi­fi­ca­tive les émis­sions, mais leur densité éner­gé­tique étant moindre, ils ne conviennent pas encore à la moto­ri­sa­tion de trac­teurs à forte puis­sance. L’utilisation d’huile de colza repré­sente un bon compromis.

La moto­ri­sa­tion élec­trique, un objectif louable

Quant à la moto­ri­sa­tion élec­trique, elle offri­rait de la flexi­bi­lité, de la légè­reté et un encom­bre­ment plus faible pour une puis­sance donnée. Mais ces consi­dé­ra­tions se limitent au moteur. À l’heure actuelle, les batte­ries sont encore trop lourdes et peu perfor­mantes pour une appli­ca­tion à grande échelle. Dans ce domaine, des progrès sont attendus au cours des prochaines années.

Dans l’intervalle, les biocar­bu­rants repré­sentent une tech­no­logie de tran­si­tion promet­teuse et dispo­nible. L’huile de colza est une alter­na­tive parti­cu­liè­re­ment inté­res­sante car elle offre une densité éner­gé­tique de 93 % par rapport au gazole tout en permet­tant une réduc­tion des émis­sions de 91 % (en cas de consom­ma­tion d’une produc­tion décen­tra­lisée).

Compte tenu de leur faible densité éner­gé­tique, les proto­types de trac­teurs élec­triques forte puis­sance actuels restent très lourds, et ne sont donc pas encore adaptés à un déploie­ment sur le terrain.

L’huile de colza comme solu­tion durable

Beau­coup d’exploitations cultivent le colza et pour­raient disposer de l’huile qui en est extraite. Le tour­teau obtenu par pres­sion à froid présente quant à lui une teneur en protéine élevée et contribue ainsi à une alimen­ta­tion animale de qualité. L’un des aspects posi­tifs du tour­teau de colza est qu’il peut remplacer en partie le soja d’importation, aux effets indé­si­rables bien connus, qu’il s’agisse de sa culture, de son trans­port ou de ses coûts.

De ce point de vue, le colza constitue une solu­tion durable, dans la mesure où la quan­tité produite couvre les besoins de l’exploitation. En effet, cette solu­tion n’entre pas en concur­rence avec la produc­tion alimen­taire. Ce carbu­rant permet de tran­cher la ques­tion contro­versée du « réser­voir ou de l’assiette », et de conci­lier les deux objec­tifs.

Le trac­teur « multi­fuel » peut fonc­tionner avec du gazole, du bioga­zole, de l’huile végé­tale brute P100 et de l’huile végé­tale hydro­génée (HVO).

Projet de trac­teur multi-carbu­rant

Le profes­seur Peter Pickel est respon­sable des tech­no­lo­gies du futur à l’European Tech­no­logy Inno­va­tion Center de John Deere, à Kaisers­lau­tern (Alle­magne).

L’utilisation d’huile de colza en paral­lèle d’autres biocar­bu­rants requiert des adap­ta­tions sur les machines. Ce sont prin­ci­pa­le­ment la puis­sance motrice, le trai­te­ment des gaz, la lubri­fi­ca­tion du moteur et le compor­te­ment au démar­rage à froid du système de trans­mis­sion des trac­teurs qui doivent être modi­fiés.

Chez John Deere, nous avons répondu à ce défi avec notre projet de trac­teur multi-carbu­rant. Celui-ci peut fonc­tionner avec du gazole, du bioga­zole, de l’huile végé­tale brute P100 et de l’huile végé­tale hydro­génée (HVO). Des mélanges de biocar­bu­rants peuvent égale­ment être utilisés.

Grâce à des capteurs, le système recon­naît de manière auto­nome le carbu­rant utilisé. Lors de tests inten­sifs, notam­ment en colla­bo­ra­tion avec l’université tech­nique de Kaisers­lau­tern, nous avons pu démon­trer que le moteur fonc­tionne sans aucune dimi­nu­tion de perfor­mance et sans surcon­som­ma­tion. En outre, le moteur respecte la norme anti­pol­lu­tion Stage V appli­cable aux machines de travail.