Christoph Wigger, Directeur Small Grains Production Systems chez John Deere, travaille avec son équipe à une meilleure compréhension des exigences des clients à l’échelle mondiale. L’objectif : développer des solutions techniques pour une production plus rentable et plus durable dans les systèmes céréaliers. Nombre de machines et de systèmes déjà disponibles offrent des possibilités pour économiser les intrants.
Début 2022, les prix des intrants agricoles ont considérablement augmenté. Comment ont réagi les clients ?
Une enquête auprès de la clientèle a révélé que plus de 20 % des exploitations ont adapté leur assolement pour 2023 suite à l’augmentation des coûts. Au-delà, de nombreux clients cherchent à utiliser moins d’engrais, à remplacer l’engrais minéral par de l’engrais organique, et à appliquer les phytosanitaires de façon plus ciblée. Enfin, un nombre croissant d’entre eux s’orientent vers le désherbage mécanique.
Comment John Deere peut aider les agriculteurs à baisser leurs coûts de production ?
Ici, les équipements du type pulvérisateur ou semoir de précision ont un rôle important à jouer. Sur ces outils, nous proposons le contrôle de sections, le semis monograine et la commande individuelle des buses. Nous développons également des systèmes d’IA capables d’identifier les adventices et de les combattre de manière ciblée. En coopération avec xarvio de BASF, nous nous appuyons sur des essais dédiés à la fenêtre d’application et au dosage des fongicides, dans le but de simplifier la tâche aux utilisateurs. Ceci est rendu possible par une interface améliorée entre xarvio et le John Deere Operations Center, permettant d’automatiser la transmission des données d’application au pulvérisateur.
Et dans le domaine de la fertilisation ?
Notre enquête a révélé que plus de la moitié des agriculteurs interrogés cherchaient à réduire leurs engrais azotés, et que 40 % d’entre eux souhaitaient épandre davantage d’engrais organiques. Il est possible de créer ou de transférer des cartes de fertilisation par parcelle dans le John Deere Operations Center. À cette fin, des analyses du sol et des cartes de rendement sont utilisées – mais aussi des informations sur la composition de la récolte (principalement la teneur protéique), désormais mesurable avec le capteur Harvest Lab pour moissonneuse-batteuse.
Les épandeurs d’engrais avec contrôle de section ou les épandeurs de lisier équipés d’un capteur NIR, comme le HarvestLab de John Deere, permettent d’appliquer les fertilisants avec précision et au plus près des besoins. Dans le cadre de nos objectifs de durabilité, nous ciblons une amélioration de l’efficacité d’utilisation de l’azote de l’ordre de 20 %.
L’Operations Center propose-t-il des instruments pour baisser les coûts ?
L’Operations Center sert à mieux planifier la campagne et les étapes de travail individuelles, de manière à ajuster plus finement l’utilisation des semences, des engrais et des produits phytosanitaires, tout en optimisant la logistique et le temps de travail des équipements. Cette utilisation plus efficace du parc matériel permet dès lors de maîtriser la consommation de GNR.
Qu’en est-il de l’acceptation de ces nouvelles technologies ?
Les systèmes de guidage et les contrôles de sections automatiques sont largement diffusés, de nombreux clients les utilisent. À la lumière de nos enquêtes clientèle, nous prévoyons que ce sont ces systèmes en particulier qui vont gagner du terrain. Environ un tiers des personnes interrogées déclarent en outre vouloir s’orienter davantage, dans leur protection des cultures, sur des préconisations établies par outil numérique.
Nous avons par ailleurs observé une accélération considérable dans l’adaption de systèmes de télémétrie depuis la pandémie de Covid. Tant les concessionnaires que les clients ont reconnu les avantages des machines connectées. Certains problèmes mineurs, concernant par exemple l’optimisation des paramètres machine, peuvent être traités directement sur place, en cabine, via un diagnostic et des réglages à distance. Avec le Connected Support, John Deere s’est positionné en leader du marché. Le concessionnaire peut intervenir en direct sans avoir à se déplacer chez le client.
Toutes les possibilités techniques sont-elles déjà déployées ?
Des fonctions telles que HarvestSmart sur moissonneuse-batteuse ou le système de gestion des bouts de champ iTEC sur tracteur représentent pour nos clients un potentiel énorme d’automatisation et, partant de là, des gain d’efficacité. Nous faisons malheureusement le constat qu’elles ne sont pas toujours activées. C’est pour cette raison que nombre de nos concessionnaires proposent des formations pour préparer les utilisateurs à la prochaine capmagne.
Nous veillons à ce que les nouvelles fonctions soient intuitives, simples à activer et à utiliser.
Christoph Wigger
Les clients peuvent aussi se familiariser avec les technologies grâce à des tutoriels vidéo sur notre site Internet. Nous avons également participé au développement d’un module d’agriculture de précision pour le jeu Farming Simulator, afin d’initier, tout particulièrement, la jeune génération aux nouvelles technologies. En étroite concertation avec nos ingénieurs, nous veillons à ce que les nouvelles fonctions soient conçues de manière intuitives, et à ce qu’elles soient simples à activer et à utiliser.
Dans quels secteurs investit John Deere à moyen et long terme pour continuer à baisser les coûts de production ?
Dans la planification de nos activités de recherche et de développement, nous collaborons de plus en plus étroitement avec des exploitations témoin dans plusieurs pays, avec des conditions climatiques et des types de sols divers. Ceci nous donne une bonne vue d’ensemble des systèmes de production existants, et des différentes tendances actuelles, qu’il s’agisse des semences hybrides, des produits phytosanitaires ou des engrais. Nous évaluons également dans quelle mesure la technologie permet d’améliorer les marges.
Selon notre analyse, les étapes de travail recèlant le plus grand potentiel d’efficience pour les agriculteurs sont le semis, la fertilisation et la protection des cultures. En nous basant sur les observations de terrain, nous développons des solutions machinisme capables d’offrir une nouvelle valeur ajoutée aux clients. Puis nous testons directement leur faisabilité sur les exploitations partenaires. Enfin, nous examinons l’impact du changement d’une pratique lors d’une étape de travail à l’échelle de l’itinéraire technique. Notre approche est donc globale.
À côté de la modulation, John Deere travaille beaucoup sur l’automatisation des machines. Pour quelle raison ?
L’un des enjeux fondamentaux de l’automatisation, pour l’agriculteur, est de pouvoir opérer avec la même productivité en fin de journée que pendant la première heure de travail. Notre objectif est donc de lui simplifier la tâche. Nous constatons également qu’il est de plus en plus difficile pour les exploitants et les entrepreneurs de trouver le personnel approprié, alors même que la qualité du travail est soumise à des exigences croissantes.
L’automatisation représente une opportunité, en cela qu’elle simplifie l’utilisation des machines tout en garantissant une qualité de travail élevée. Jusqu’à présent, nous avons automatisé des étapes de travail ou les fonctionnalités individuelles telles que le guidage. Nous avons présenté l’an dernier aux États-Unis le premier tracteur capable de travailler le sol en mode entièrement autonome (sans conducteur). L’automatisation partielle préfigure donc une automatisation intégrale. Notre objectif est de développer un système de production agricole entièrement autonome d’ici 2030.
À quoi servent les kits d’adaptation ?
Dans le cadre de la stratégie Life-Cycle-Solution, nous proposons à notre clientèle des kits d’adaptation permettant d’installer les dernières solutions technologiques sur des modèles plus anciens. Le client peut ainsi profiter des avancées techniques les plus récentes sur son exploitation, et économiser des intants, sans devoir acquérir de machine neuve.
La plupart de nos clients possèdent d’ailleurs plusieurs matériels John Deere, et ces machines ne sont pas toutes forcément au même niveau technique, ce qui est un obstacle au fonctionnement optimal dans une configuration de machines connectées. Dans ce cas, les kits d’adaptation permettent de conformer tout le parc matériel à un standard technique homogène.