RécolteUn robot pour récolter la salade

La récolte des laitues est gour­mande en main d’œuvre. Au Royaume-Uni, un projet lancé en 2021 vient de mettre au point une récol­teuse entiè­re­ment auto­ma­tisée.

Chaque année, la filière de laitue britan­nique voit débar­quer des milliers de saison­niers pour la récolte et le condi­tion­ne­ment. Mais la dispo­ni­bi­lité de la main d’œuvre a diminué. Celle issue de l’immigration est en recul – notam­ment en raison du Brexit et de la Covid19 – mais c’est aussi le cas de la main-d’œuvre natio­nale, rebutée par la péni­bi­lité de la récolte manuelle.

Or les produc­teurs d’outre-Manche dépendent des saison­niers pour le poste récolte-condi­tion­ne­ment, comme l’explique Dermot Tobin, direc­teur agri­cul­ture du produc­teur PDM (1 538 ha). « La quasi-tota­lité de la laitue que vous voyez dans les rayons des super­mar­chés britan­niques est coupée à la main. Trouver de la main d’œuvre devient délicat et avec l’inflation des salaires, qui augmentent beau­coup plus vite que les prix à la produc­tion, les marges sont vrai­ment serrées. »

Du côté des consom­ma­teurs, la demande reste haute. La laitue iceberg est ainsi la première culture légu­mière en valeur au Royaume-Uni, avec quelque 99 000 t récol­tées en 2019 et une valeur marchande de 178 millions de livres ster­ling (210 millions d’euros). Sachant que sa récolte dépen­dait jusqu’à présent de la main-d’œuvre manuelle, la péren­nité de cette produc­tion se trouve menacée. Une situa­tion simi­laire à celle rencon­trée sur le conti­nent, ou encore aux États-Unis. Ce qui pousse le marché des tech­no­lo­gies de récolte à se déve­lopper.

Les bandes du convoyeur à pince­ment main­tiennent la laitue pour que la tige puisse être coupée.

La bonne coupe

Pour compenser la pénurie de main d’œuvre, un grou­pe­ment d’acteurs a récem­ment lancé un projet commun de recherche et déve­lop­pe­ment visant la mise au point d’une récol­teuse de laitue robo­tisée. Impli­quant notam­ment le machi­niste alle­mand Grimme, le centre d’innovation britan­nique Agri-EPI Centre ou encore l’Université Harper Adams, ce projet lancé en avril 2021 abou­tis­sait en septembre dernier à un proto­type fonc­tionnel.

Une récol­teuse de poireaux a servi de point de départ au déve­lop­pe­ment du robot. Sur cette base, des vis sans fin coniques ont été instal­lées et orien­tées de manière à soulever les salades du sol et à l’amener au convoyeur. La gageure est de retirer méca­ni­que­ment les feuilles exté­rieures et, à l’aide d’une caméra et d’analyse d’image, d’identifier préci­sé­ment le point de coupe, où un couteau robo­tique tran­chera chaque tige pour en laisser environ 3 mm.

Le proto­type de récol­teuse est monté sur le côté d’un trac­teur.

« Le défi consiste à iden­ti­fier le bon point de coupe et à déclen­cher le couteau », explique Duncan Ross, respon­sable du déve­lop­pe­ment du projet chez Agri-EPI. Plusieurs problèmes restent à surmonter, notam­ment les déchets prove­nant de l’effeuillage qui tendent à obscurcir la vision de la machine.

Un gros inves­tis­se­ment

Actuel­le­ment, la récol­teuse est attelée laté­ra­le­ment à un trac­teur, le conduc­teur étant guidé par une caméra, mais l’objectif à long terme est d’avoir trois robots de récolte combinés à une unité de condi­tion­ne­ment, de sorte que les laitues puissent être récol­tées auto­ma­ti­que­ment puis embal­lées à la main et condi­tion­nées immé­dia­te­ment pour les gros­sistes. Selon ses concep­teurs, le robot pour­rait réduire de moitié les besoins en main-d’œuvre, tout en rédui­sant la péni­bi­lité de la récolte.

Le défi consiste à iden­ti­fier le bon point de coupe et à déclen­cher le couteau.

Duncan Ross

Le projet se situe pour le moment au stade de l’étude de faisa­bi­lité, et il faudra encore du temps avant que les champs de laitue du Royaume-Uni – et du conti­nent – ne voient ces robots en action. Sans surprise, la tech­nique ciblera en prio­rité les gros produc­teurs capables d’investir plus de 300 000 £ par machine (355 000 €) – un coût en partie rela­ti­visé par la baisse des charges de main d’œuvre, et le simple fait que d’ici là, la situa­tion sur le marché du travail devrait encore se compli­quer. « Le secteur doit se tourner la tech­no­logie robo­tique pour réduire sa dépen­dance vis à vis de la main-d’œuvre », estime Dermot Tobin. « Être impliqué dans ce projet est de la plus haute impor­tance pour notre entre­prise. »

Tous les parte­naires asso­ciés à ce projet : 

Le projet est financé par Inno­vate UK.